La collaboration interdisciplinaire… un modèle convaincant ! 

Dans un contexte d’évolution sociétale où le vieillissement de la population et l’augmentation des pathologies chroniques et des situations complexes (Perone et al., 2014) poussent les professionnels des soins de santé à se positionner différemment, la notion du travail interdisciplinaire prend tout son sens. 

Catherine Dans

Maître Assistante   HELMo Sainte-Julienne

Chercheuse dans le domaine du patient partenaire d’enseignement.

 « L’interdisciplinarité évoque l’idée du partage et implique une collaboration des différents professionnels auprès d’un même patient ou d’une même population pour répondre, de manière intégrée et globale, aux besoins complexes d’aide et de soins. » (Buret, 2020, p. 59) 

La notion d’interdisciplinarité se différencie de la notion de pluridisciplinarité par 2 aspects qui la caractérisent : la collaboration et l’intégration. (Buret, 2020) 

Dans cet article, nous nous intéressons plus particulièrement à la collaboration. Ma double expérience d’infirmière en santé communautaire et d’enseignante me laisse à penser que cette dernière est loin d’être innée. Parmi les facteurs favorisant la collaboration interdisciplinaire, j’épinglerais l’importance du contexte dans lequel le professionnel est amené à travailler. Par exemple, j’observe que les étudiants en stage en maison médicale, où la culture du partage et du travail commun existe, entrent facilement dans cette dynamique de travail avec les professionnels des autres disciplines. 

 Un autre facteur qui me paraît très important est l’expérimentation positive de cette pratique de travail. Depuis 3 ans, nous menons à la Haute Ecole HELMo, en collaboration avec l’Uliège, un projet de recherche portant sur la collaboration interdisciplinaire. Dans ce cadre, mes collègues provenant de disciplines différentes et moi-même avons développé des séminaires d’échanges et d’analyse autour de situations professionnelles. Les participants qui vivent ces moments de formation sont étudiants infirmiers, psychomotriciens, sages-femmes et assistants en médecine générale. Ils sont tous en fin de cursus et donc, proches de la vie professionnelle. Il est très intéressant de voir à quel point ces étudiants sont ouverts et désireux de collaborer et comme cette notion d’entraide et de complémentarité des savoirs apparaît de façon naturelle lors de ces séminaires. D’emblée, j’ai constaté qu’un climat de bienveillance, d’écoute et de respect mutuel s’installait. Les valeurs professionnelles communes mises en avant dans le travail permettaient d’augmenter la cohésion entre ces différents partenaires de soin. Certains d’entre eux trouvaient également rassurant le fait de s’appuyer sur les compétences d’autres disciplines pour assurer la continuité des soins auprès d’un même bénéficiaire. D’autres participants exprimaient que les échanges générés lors d’une réunion permettaient de mieux considérer la personne dans sa globalité. 

Souvent, les étudiants étaient demandeurs de l’ouverture de ces séances à d’autres professionnels de la santé tels que les assistants sociaux, les kinésithérapeutes, les psychologues ou les diététiciens. Lors de nos échanges, ces étudiants expliquaient en effet que l’apport de ces autres disciplines constituerait une richesse d’offre supplémentaire à proposer au patient. Bien plus, certains ont exprimé le besoin et l’envie que le patient soit présent à ces séminaires, ce qui me laisse à penser qu’une évolution de la conception du modèle des soins est en route. D’une position paternaliste ces futurs soignants ont envie de passer au développement d’une posture de partenariat dans le soin, comme mentionnée dans le Modèle de Montréal (Pomey et al., 2015). Le patient, reconnu comme expert de la vie avec sa maladie, est un acteur indispensable avec qui collaborer afin de maintenir ou améliorer son état de santé. 

En tant qu’enseignante, je vis ces moments de formation comme des temps forts ! Percevoir à quel point les étudiants sont désireux d’apprendre à mieux connaître l’autre afin de collaborer davantage avec lui est véritablement dynamisant. Grâce à leurs diverses expériences en stage, les étudiants se rendent compte qu’une fois établis dans un contexte de travail, il n’est pas toujours simple pour eux de prendre le temps d’apprendre à mieux connaître les autres professionnels et les services situés dans une même zone géographique. C’est pourquoi ce travail de connaissance du réseau lors de la formation initiale leur paraît utile et nécessaire. A la fin des ateliers, tous se sont montrés désireux de continuer ces moments de rencontre et de travail interdisciplinaire durant leurs formations respectives ou au début de leur vie professionnelle. En somme, je peux dire que la demande est là car ce sont eux, les professionnels de demain. 

A présent, il nous faut continuer à inventer ou à poursuivre ces moments de rencontre et d’échanges avec le patient. Sous quelles formes, dans quels endroits, avec quel financement ? Les questions sont lancées, la parole vous est donnée… Et vous, quelles sont vos expériences et vos envies en matière de collaboration interdisciplinaire ? 

 


Bibliographie : 

Buret, L. (2020). Interdisciplinarité en santé. Analyse et perspectives d’avenir pour les professionnels de première ligne. (Doctoral dissertation, Université de Liège). Retrieved from http://hdl.handle.net/2268/257502 

Perone, N., Filliettaz, S., Budan, F., Schaller, P., Balavoine, J. & Waldvogel, F. (2015). Concrétiser la prise en charge interdisciplinaire ambulatoire de la complexité. Santé Publique, S(HS), 77-86. https://doi.org/10.3917/spub.150.0077 

Pomey, M.-P., Flora, L., Karazivan, P., Dumez, V., Lebel, P., Vanier, M.-C., Débarges, B., Clavel, N., & Jouet, E. (2015). Le « Montreal model » : Enjeux du partenariat relationnel entre patients et professionnels de la santé. Santé Publique, S1(HS), 41‑50. Cairn.info. http://doi.org/10.3917/spub.150.0041 

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